Dans un tribune qu'on publie ci-dessous, plusieurs soignants de Mayotte interpellent plusieurs ministres dont François Braun (Ministre de la Santé et de la prévention), Gérald Darmanin (Ministre de l'Intérieur et des Outre-Mer), Jean-François Carenco (Ministre des Outre-Mer) mais aussi Thierry Suquet (Préfet de Mayotte) et Olivier Brahic (Directeur de l'agence de Santé de Mayotte) au sujet de l'opération Wuambushu.
La Tribune
"Messieurs les ministres, Monsieur le préfet, Monsieur le directeur,
Nous, soignants de Mayotte, apprenons dans la presse, la planification d’une opération de grande envergure, baptisée Wuambushu. Elle aurait pour but la lutte contre l’immigration illégale, l’insalubrité publique et l’insécurité sur l’ensemble du territoire de Mayotte. Proposée par le ministre de l’Intérieur et validée en conseil de Défense par le président de la République, l’opération débuterait le 20 avril 2023.
Rassemblés autour de cette problématique, nous souhaitons exprimer nos plus vives inquiétudes sur l’impact sanitaire de ce projet. En effet, le bilan des précédentes interventions de grande ampleur en matière de lutte contre l’immigration ou l’insécurité impliquait des conséquences dramatiques :
- Génération de situations à risque infectieux épidémique dans les zones d’hébergement d’urgence (promiscuité, rupture d’approvisionnement en eau potable, forte incidence des pathologies hydriques et des maladies à prévention vaccinale).
- Limitation de l’accès aux soins, quels que soient les individus : soit à cause de la destruction de leur habitat, soit à cause des contrôles d’identité exacerbés, soit par l’effet indirect des blocages et des violences.
- Ruptures et retards de prise en charge : décompensation des pathologies chroniques, retards diagnostiques, isolement des enfants malades sans parents, abandon des patients avec handicaps majeurs et décès à domicile.
- Majoration des couts économiques pour le service public, due notamment aux effets collatéraux pour les patients graves décompensés à court et à moyen terme.
- Restriction de l’offre de soins : déprogrammation de la réserve sanitaire en appui sur le territoire, effet délétère sur l’attractivité des personnels soignants dans le département.
- Retentissement structurel sur la société civile : surcharge des infrastructures sanitaires en aval des opérations et dépassement des capacités de prise en charge, déficit d’hébergements avec précarisation secondaire, surrisque épidémique, violences (physiques et psychologiques subies), préjudices moraux et psychologiques irréversibles notamment chez les enfants, augmentation du nombre de mineurs isolés.
En tant que soignants, nous devons garantir la santé de l’ensemble des personnes sur le département, quelle que soit leur situation administrative (français, étrangers en situation régulière ou irrégulière). Notre engagement auprès de la population de Mayotte n’a pas changé et ne changera pas. Néanmoins, nous appréhendons les effets directs et collatéraux de Wuambushu sur nos patients. C’est pourquoi nous demandons à être informés des détails de votre projet afin d’en limiter les répercussions négatives sur le système de soin.
Pour cela, nous souhaitons :
- Prendre connaissance de la procédure d’hébergement et de mise à l’abri des personnes en cas de déplacements de populations afin de connaître le devenir social de nos patients.
- Partager avec vos services, les modalités de protection des personnes vulnérables nécessitant un suivi médical rapproché et régulier par nos soins ; avec une attention particulière pour les mineurs et les personnes requérant un accompagnement par un tiers (aidant). Cela passe par la prise en compte systématique des certificats médicaux établis par nos soins, pour n’importe quel patient atteint d’une maladie chronique grave et leurs aidants (père, mère ou accompagnant désigné).
- Permettre à nos équipes de soignants et aux acteurs associatifs locaux de poursuivre toutes leurs actions de protection des personnes fragiles, sans restriction horaire, de jour comme de nuit, dans les lieux d’hébergement et de rétention prévus par vos soins.
- Avoir la certitude qu’aucune intervention ne soit opérée dans les lieux de soin (structures hospitalières, centres de protection maternelle et infantile, cabinets de professionnels de santé, locaux des associations du secteur sanitaire et social).
Dans l’intérêt de la santé publique, nous espérons que ces mesures pourront être mises en œuvre rapidement, en bonne harmonie avec vos services.
Nous sommes engagés sous serment et par conviction à soigner quiconque le nécessite sur le sol français. Profondément investis dans le 101ème département, nous portons par ailleurs des projets destinés à développer la prise en charge de la population de Mayotte en respectant les valeurs de la République qui prônent l’équité et la solidarité.
C’est dans une totale indépendance que nous accomplissons chaque jour notre mission. Pleinement conscients de la complexité de la situation politique et sociale du territoire de Mayotte, nous venons aujourd’hui vers vous dans la plus sincère objectivité médicale.
Dans notre Etat de droit, l’unique objectif qui nous anime est de permettre à chacun, de bénéficier d’une prise en charge médicale nécessaire à un bon état de santé. C’est pourquoi nous sollicitons votre éclairage sur les garanties relatives à la continuité de l’accès aux soins pour la population de Mayotte avant, pendant et après Wuambushu.
Dans l’attente d’une réponse favorable de votre part, nous vous adressons l’assurance de nos meilleures salutations."
La Tribune
"Messieurs les ministres, Monsieur le préfet, Monsieur le directeur,
Nous, soignants de Mayotte, apprenons dans la presse, la planification d’une opération de grande envergure, baptisée Wuambushu. Elle aurait pour but la lutte contre l’immigration illégale, l’insalubrité publique et l’insécurité sur l’ensemble du territoire de Mayotte. Proposée par le ministre de l’Intérieur et validée en conseil de Défense par le président de la République, l’opération débuterait le 20 avril 2023.
Rassemblés autour de cette problématique, nous souhaitons exprimer nos plus vives inquiétudes sur l’impact sanitaire de ce projet. En effet, le bilan des précédentes interventions de grande ampleur en matière de lutte contre l’immigration ou l’insécurité impliquait des conséquences dramatiques :
- Génération de situations à risque infectieux épidémique dans les zones d’hébergement d’urgence (promiscuité, rupture d’approvisionnement en eau potable, forte incidence des pathologies hydriques et des maladies à prévention vaccinale).
- Limitation de l’accès aux soins, quels que soient les individus : soit à cause de la destruction de leur habitat, soit à cause des contrôles d’identité exacerbés, soit par l’effet indirect des blocages et des violences.
- Ruptures et retards de prise en charge : décompensation des pathologies chroniques, retards diagnostiques, isolement des enfants malades sans parents, abandon des patients avec handicaps majeurs et décès à domicile.
- Majoration des couts économiques pour le service public, due notamment aux effets collatéraux pour les patients graves décompensés à court et à moyen terme.
- Restriction de l’offre de soins : déprogrammation de la réserve sanitaire en appui sur le territoire, effet délétère sur l’attractivité des personnels soignants dans le département.
- Retentissement structurel sur la société civile : surcharge des infrastructures sanitaires en aval des opérations et dépassement des capacités de prise en charge, déficit d’hébergements avec précarisation secondaire, surrisque épidémique, violences (physiques et psychologiques subies), préjudices moraux et psychologiques irréversibles notamment chez les enfants, augmentation du nombre de mineurs isolés.
En tant que soignants, nous devons garantir la santé de l’ensemble des personnes sur le département, quelle que soit leur situation administrative (français, étrangers en situation régulière ou irrégulière). Notre engagement auprès de la population de Mayotte n’a pas changé et ne changera pas. Néanmoins, nous appréhendons les effets directs et collatéraux de Wuambushu sur nos patients. C’est pourquoi nous demandons à être informés des détails de votre projet afin d’en limiter les répercussions négatives sur le système de soin.
Pour cela, nous souhaitons :
- Prendre connaissance de la procédure d’hébergement et de mise à l’abri des personnes en cas de déplacements de populations afin de connaître le devenir social de nos patients.
- Partager avec vos services, les modalités de protection des personnes vulnérables nécessitant un suivi médical rapproché et régulier par nos soins ; avec une attention particulière pour les mineurs et les personnes requérant un accompagnement par un tiers (aidant). Cela passe par la prise en compte systématique des certificats médicaux établis par nos soins, pour n’importe quel patient atteint d’une maladie chronique grave et leurs aidants (père, mère ou accompagnant désigné).
- Permettre à nos équipes de soignants et aux acteurs associatifs locaux de poursuivre toutes leurs actions de protection des personnes fragiles, sans restriction horaire, de jour comme de nuit, dans les lieux d’hébergement et de rétention prévus par vos soins.
- Avoir la certitude qu’aucune intervention ne soit opérée dans les lieux de soin (structures hospitalières, centres de protection maternelle et infantile, cabinets de professionnels de santé, locaux des associations du secteur sanitaire et social).
Dans l’intérêt de la santé publique, nous espérons que ces mesures pourront être mises en œuvre rapidement, en bonne harmonie avec vos services.
Nous sommes engagés sous serment et par conviction à soigner quiconque le nécessite sur le sol français. Profondément investis dans le 101ème département, nous portons par ailleurs des projets destinés à développer la prise en charge de la population de Mayotte en respectant les valeurs de la République qui prônent l’équité et la solidarité.
C’est dans une totale indépendance que nous accomplissons chaque jour notre mission. Pleinement conscients de la complexité de la situation politique et sociale du territoire de Mayotte, nous venons aujourd’hui vers vous dans la plus sincère objectivité médicale.
Dans notre Etat de droit, l’unique objectif qui nous anime est de permettre à chacun, de bénéficier d’une prise en charge médicale nécessaire à un bon état de santé. C’est pourquoi nous sollicitons votre éclairage sur les garanties relatives à la continuité de l’accès aux soins pour la population de Mayotte avant, pendant et après Wuambushu.
Dans l’attente d’une réponse favorable de votre part, nous vous adressons l’assurance de nos meilleures salutations."
REDACTEURS
Dr Julie Larue, Dr Hugo Martinière, Dr Alice Miquel, Dr Cassandre Pasqualini, Dr Odile Pointeau, Dr Marion Subiros, Dr Etienne Thomas
Liste de 170 premiers signataires, par ordre alphabétique
Docteur Madi Abdou
Madame Anne-Laure Albisetti
Docteur Marion Angue
Madame Anrifia Bacar
Monsieur Sébastien Bailly
Madame Hélène Balloud
Madame Elisabeth Banag
Moutlen Docteur Antoine Bardé
Monsieur Valentin Barreau
Madame Axelle Baumont
Docteur Thomas Beeken
Madame Lauranne Bellamy
Madame Eva Bembekoff
Docteur Myriam Ben Azoun
Madame Fanny Bergeret
Madame Laura Bertranda
Docteur Maxime Blanchet
Madame Cloé Bonningue
Docteur Yvonnick Boué
Docteur Catherine Bourbon
Docteur Lucile Bourgue
Madame Pascale Bourhane
Monsieur Baptiste Bourseul
Madame Anne Broggi
Madame Julie Buscail
Monsieur David Caillé
Docteur Marion Caillé Sterke
Docteur Abdourahim Chamouine
Madame Bonnie Chateau
Docteur Pauline Chatelain
Madame Lise Chauvin
Madame Idaline Chemin
Monsieur Benjamin Chevrel
Madame Anne Cibiel-Marin
Docteur Guénolé Creach
Madame Axelle D’antuono
Docteur Alla-ih Daroussi
Docteur Aurélie De Bruyne
Docteur Hugues Deloute
Madame Marion Denis
Docteur Abdoulahy Diallo Madame Léa Donet
Monsieur Lucas Duchaufour
Docteur Philippe Durasnel
Monsieur Kevin Eberhardt
Madame Pauline Eschapasse
Docteur Fanny Fabre
Madame Mathilde Ferrand
Docteur Clémence Ferrier
Docteur Johana Filatriau
Docteur Joelle Fischer
Madame Mélodie Fortunat
Madame Sandra Fougeras
Monsieur Matis Fugier
Docteur Laurie Gagneux
Madame Tiphaine Gallois
Docteur Danaé Gamelon
Madame Floriane Garido
Docteur Alain Garou
Madame Clélia Gasquet-Blanchard
Docteur Laurent Gayrard
Madame Marine Geissmann
Madame Marie Giot
Monsieur Thomas Girardeau
Docteur Carole Gonzalez
Madame Marie Grosjean
Madame Nadège Grout
Docteur Isabelle Guenot
Madame Maria Guevezov
Docteur Théo Guilhem-Ducléon
Madame Bernadette Guionneau
Docteur Soumeya Haji
Docteur Nawel Haji
Monsieur Quentin Hallopé
Madame Elsa Haniche
Madame Alison Harris
Madame Marine Hassane Achraf
Docteur Marion Hattermann
Madame Emmanuelle Heitzmann
Madame Lucile Heitzmann
Docteur Xavier Hubert
Madame Nassabia Ibrahim
Monsieur El Habib Ismael
Docteur Bernard Jeangeorges
Madame Serena Jegousse
Docteur Antoine Joubert
Docteur Yasmina Khitri
Docteur Magdalena Klass
Docteur Sarah Koutala
Madame Juliette Labaume
Madame Morgane Labbé
Madame Marion Lacoste
Madame Margaux Laissus
Madame Enora Larreur
Docteur Julie Larue
Madame Marie Laugier
Madame Rosanne Leblond
Madame Jeanne Le Bris Docteur
Mathieu Le Corre
Madame Mélanie Le Sourd
Docteur Charlène Ledoux
Monsieur Titouan Legal
Madame Lucie Léglise
Docteur Mathilde Legros
Madame Sophie Lejeune
Madame Mégane Leseurre
Madame Maëlis Lesné
Madame Victoria Levet
Madame Angèle Lf
Madame Camille Lutard
Docteur Katia Magnin
Docteur Hugo Martiniere
Docteur Johan Masson
Madame Ginebra Mateu Pinol
Madame Claire Mathiey
Madame Dorina Matioc
Madame Fleur Meissonier
Madame Manuela Melessike
Madame Léa Mendes
Docteur Alice Miquel
Docteur Ali M'lamaly
Madame Fatma Mohamed
Madame Moudaina Mohamed
Madame Aurelia Morabito Ali
Monsieur Bastien Morelli
Madame Nassimata Mze Mchinda
Docteur Mohamadou Niang
Madame Salmat Oumouri
Docteur Cassandre Pasqualini
Madame Chloé Pépin-Donat
Monsieur Clément Pesqueira
Madame Clarisse Philipona
Madame Maud Pineau Robert
Madame Angelie Piot
Docteur Odile Pointeau
Docteur Jean Poisson
Madame Mathilde Potier
Madame Alice Pouchain
Docteur François Pousset
Docteur Anne Claire Praud
Docteur Andriamanohisoa Ramboamarotafika
Monsieur Titouan Redois
Docteur Alain Renaux
Madame Lisa Rocheteau
Madame Caroline Rodrigue
Docteur Elise Sagnes
Madame Nolwenn Saluden
Docteur Damien Sanfilippo
Monsieur Donasian Segalin
Docteur Breno Speckhann
Docteur Marion Subiros
Madame Rosalia Tapia Merino
Madame Maud Terrier
Docteur Aline Tesei
Docteur Lauranne Teule
Docteur Etienne Thomas
Madame Louise Tilman
Madame Marie-Ève Tremblay
Madame François Triquet
Madame Alice Truffault
Docteur Justine Uguen
Docteur Marion Vair-Piova
Madame Elodie Verna
Docteur Anne Vernaz
Docteur Mariam Viollet
Madame Laurie Wallet
Docteur Pauline Weiss
Souhaitant garder l’anonymat : Monsieur A et Monsieur M